Tribune co-écrite avec Elliott Aubin, publiée sur Marianne le 25 décembre.
L’histoire ne se répète jamais sans bégayer. Il y a 10 ans déjà, le centenaire de la loi de Laïcité était passé presque inaperçu. On aurait pu s’attendre à ce qu’après les attentats de janvier 2015, puis ceux du mois dernier, les 110 ans de la loi dite de séparation des églises et de l’Etat aurait pu donner lieu à plus de solennité. Mis-à-part une semaine de la laïcité dans l’enseignement, reposant le plus souvent sur la bonne volonté des enseignants, rien ou presque. La manifestation prévue par l’association la Libre Pensée a même été interdite, sous prétexte d’état d’urgence.
Nous affirmons cependant qu’il y a urgence à réaffirmer la nécessité de la laïcité en France. Elle est attaquée au nom de l’ordre moral religieux, comme l’a montré la manif pour tous. Elle subit le baiser du scorpion, l’extrême droite la transformant en son contraire, l’islamophobie au lieu de la liberté de conscience religieuse. Elle est bafouée par ceux qui font mine de confondre cultuel et culturel en installant des crèches dans des lieux publics ou subventionnant des instituts de culture religieuse.
Car loin d’être une loi qui interdit et réprime, la laïcité républicaine pose comme fondement du vivre ensemble la liberté de croire ou de ne pas croire. Comme tout droit, elle ne peut être garantir que par le devoir qui l’accompagne : pour que chacun puisse croire librement, il faut empêcher tout prosélytisme, et au premier rang à l’école. Voilà pourquoi il est absurde de parler de laïcité à la française, comme s’il y avait une liberté à la française. Ce n’est pas une pratique culturelle : la liberté de conscience est réclamée dans toutes les régions du monde, il n’y a qu’à voir le combat menée par les tunisiens contre l’inscription du délit de blasphème dans leur nouvelle constitution, ou la lutte des femmes en Espagne contre l’ingérence religieuse dans la législation sur le droit à l’avortement.
110 ans après nous avons besoin de plus de laïcité. Il faut abroger la loi Debré qui accorde un avantage à l’enseignement privé confessionnel. Il faut renoncer au concordat qui maintient un financement public du culte. Dégagée de ces archaïsmes la loi de séparation des églises et de l’État n’en apparaitra que plus universelle et s’appliquant à tous les cultes.